Shipping News - One Less Heartless to Fear

Encore une fois, je me lance dans la chronique d'un disque inconnu. Vous êtes sûrement aussi impressionné que moi par mon esprit d'aventure, et ce serait normal. De l'avantage d'être ignorant, la vie est tout de suite plus trépidante. Je dis cela car il parait que Shipping News est un groupe connu de la scène indépendante des années 90. Moi j'avais jamais entendu parler, tout au plus j'ai dû écouter des morceaux de Slint, qui ont récupéré le bassiste des précédents pour leur reformation. C'est dire. Mais encore une fois, et même si l'industrie du disque est en chute libre, c'est la pochette, donc quelque chose censé être matériel et visuel, qui m'a attiré*. Si vous voulez vraiment des infos, One Less Heartless to Fear est une sorte de retour pour Shipping News car ils n'avaient pas sorti d'album depuis 2005.

 Une fois l'album écouté, il est assez amusant de se rendre compte que Shipping News pourrait facilement être assimilé à un revival du rock alternatif des années 80/90, alors qu'au final, ils étaient déjà là au départ, même si c'était vers la fin. Ce qu'on peut déjà noter sur cet album, c'est qu'il est enregistré live, avec d'ailleurs deux reprises de l'album précédent, "(Morays Or) Demons" et "Axons and Dentrites". Et à vrai dire, c'est assez surprenant de savoir cela à l'écoute, tant le son est clair, et tant les chansons sont vraiment très bien maitrisées. Difficile de croire qu'elles ont été enregistrées en une prise. Cependant, j'aurais bien aimé assister à cet enregistrement live, car l'ambiance de cet album est vraiment incroyable, très sombre et pesante, à l'image des couplets de "Antebellum". On est vraiment à fond dans une esthétique dite post-hardcore, c'est-à-dire ce punk complexe et parfois dissonnant, souvent angoissant. "This Is Not an Exit" est à ce titre le joyau de l'album, comme une fuite en avant avec une menace qui pèse au loin, elle aurait presque pu être une bande son pour La nuit du chasseur si l'association n'avait pas sonné si anachronique.

Les reprises dont j'ai parlé n'apporte pas grand chose aux originales, si ce n'est que l'enregistrement live leur donne plus de vie, et elle sont interprétées de façon plus énervées. Finalement, ce sont les morceaux les plus classiques, ceux qui jouent le plus du contraste assez facile silence/bruit. C'est surtout le son des guitares qui différencie Shipping News des autres sur ce point, comme le magnifique final de "(Morays Or) Demons". A côté de ça, on a des morceaux comme "7s" qui construisent une tension avec la batterie qui se lâche petit à petit avant de ralentir et d'exploser enfin dans un rythme saccadé façon Jesus Lizard. En parlant d'eux, c'est sans doute le groupe auquel j'ai le plus pensé en écoutant l'album, même si Shipping News n'a pas ce côté power trio instrumental qui donnait aux Jesus Lizard l'impression d'être toujours sur la brêche, David Yow chantant totalement librement dessus. Ici, le chant se veut un peu autonome, ou du moins libéré des contraintes de rythmes et de justesse, mais cela reste assez mineur. Parlons de la fin de l'album quand même, avec l'instrumental "Half a House" qui calme le jeu avant "Bad Eve" le tremplin, et "Do You Remember the Avenues ?" le décollage, violent, qui finit sur un riff de guitare ultra connu, mais extrêmement efficace, ça fait toujours plaisir.

Je ne sais pas ce que valaient Shipping News quand ils ont commencé, mais en 2010, One Less Heartless to Fear est un excellent album de rock qui, bien qu'empruntant beaucoup à certains pontes du post-hardcore, s'approprie les codes de plusieurs sous genres pour donner un rock fiévreux, incisif et surprenant. Sans doute pas un album qui regarde vers le futur, mais en tout cas un album qui a bien assimilé le passé, sans tomber dans la copie. Une bonne surprise donc, et un album qui a tout pour supporter des écoutes répétées.







*Vous aussi vous avez remarqué comme les pochettes de 2010 aiment les cercles ? Vous n'êtes pas les premiers.

Commentaires

  1. Je te conseille l'indépassable "Flies the fields" sorti en 2005 ! Excellent de bout en bout....

    Un lecteur de passage !

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