The Dodos - No Color
Faire un groupe à deux c'est une idée à double tranchant. D'un côté on est deux, c'est bien, c'est facile pour programmer des répétitions. On se crée une identité sonore forte, parce qu'à deux on peut pas tellement monter un orchestre. Mais du coup, on se sent rapidement à l'étroit. Pas assez d'interlocuteurs pour apporter de nouvelles idées, pas beaucoup de marge de manoeuvres pour se renouveller sans perdre ses fans. Les histoires des groupes à deux sont assez tristes. Les fans originaux finissent par vous renier, ou bien se lassent. Tout le monde vous reproche de ne pas savoir faire évoluer votre musique, et vous rappelle ce fameux album dans lequel vous aviez porté votre concept à son apogée.
Les Dodos ont fait une entrée fracassante dans le petit monde des duos en 2008 avec Visiter, leur deuxième album qui montrait un projet arrivé à maturité. Une batterie au jeu puissant et dense, qui imposait un rythme d'enfer, suivi par une guitare acoustique qui s'électrifiait parfois, et les deux se lançaient dans des chansons qui n'en finissaient pas de rebondir sous le coups de leurs soubresauts. Le duo de San Francisco a rapidement provoqué un vif intérêt chez moi, car ils se distinguaient nettement des Black Keys, White Stripes ou des Kills, et ils ne venaient pas d'un de ces viviers de l'indie américain qui ont tendance à produire des groupes aux saveurs similaires. Après un album en 2009 qui creusait le sillon en étant assorti d'un xylophone, The Dodos se sont dit qu'à deux c'était mieux et nous reviennent avec No Color.
Les Dodos ont fait une entrée fracassante dans le petit monde des duos en 2008 avec Visiter, leur deuxième album qui montrait un projet arrivé à maturité. Une batterie au jeu puissant et dense, qui imposait un rythme d'enfer, suivi par une guitare acoustique qui s'électrifiait parfois, et les deux se lançaient dans des chansons qui n'en finissaient pas de rebondir sous le coups de leurs soubresauts. Le duo de San Francisco a rapidement provoqué un vif intérêt chez moi, car ils se distinguaient nettement des Black Keys, White Stripes ou des Kills, et ils ne venaient pas d'un de ces viviers de l'indie américain qui ont tendance à produire des groupes aux saveurs similaires. Après un album en 2009 qui creusait le sillon en étant assorti d'un xylophone, The Dodos se sont dit qu'à deux c'était mieux et nous reviennent avec No Color.
J'ai toujours imaginé la musique des Dodos comme étant celle d'un one-man-band de Tchernobyl: 3 jambes et 4 bras au service d'un même cerveau. Car ce qui les définit le mieux selon moi c'est cette réelle alchimie rythmique entre la guitare et la batterie qui fonctionne à tous les coups. Et rien que pour ça The Dodos est devenu une valeur sûre. C'est donc sans surprises et avec plaisir que l'on retrouve notre homme maltraitant tous les instruments qui lui tombent sous la main de ses nombreux bras et pieds. Pour autant ces retrouvailles n'allaient pas de soi. No Color débute avec « Black Night » qui montre un son assez différent, et pourtant pas moins plaisant. Comme pour nous faire languir, notre mutant attend la moitié de la chanson pour nous offrir ce break rythmique qu'on a toujours attendu, et à partir de ce moment là, on est parti pour trois petits quarts d'heure d'énergie pure en compagnie de ce musicien surnaturel en roue libre, qui n'en fait qu'à sa tête, change de rythme quand ça lui chante, alterne entre guitare et batterie, violence et délicatesse, tout ça sans prévenir.
Car notre mutant, en plus d'être physiquement assez effrayant quand on se l'imagine, a l'air d'être atteint de sérieux troubles mentaux. A en écouter « Good », il ne cesse de changer de directions, et nous offre tout un panorama de sensations et de mouvements au sein d'une même chanson. Et on a l'impression d'entendre le cri d'un schizophrène dans ces « Stop! » incessant qui attaquent la chanson, et dans ce hurlement de larsen qui la termine. Ces troubles semblent matérialisés par l'arrivée impromptue de violons dans « Sleep », ou par ce xylophone exécuté d'un bras sorti de nulle part dans un « Hunting Season » qui constitue sans doute la synthèse de ce Dodos nouveau, dans la continuité de Time to Die: moins de cassures rythmiques pour plus de diversité sonore. Si cela est sans conteste une marque de renouvellement intéressante, elle conduit à affadir certaines chansons quand le travail d'arrangement n'est pas aussi prononcé, comme dans « Don't Try and Hide It ». Heureusement cela ne concerne pas tout l'album, qui se termine d'ailleurs par les deux perles « Companions » et « Don't Stop »qui parviennent habilement à mêler l'énergie qui caractérise le duo avec cette volonté incessante d'apporter de nouvelles touches sonores à leur univers.
Ce No Color ne parvient sans doute pas à retrouver la magie de Visiter, mais il est capable de montrer une solide volonté de ne pas céder aux sirènes de la facilité. Alors qu'avant The Dodos était incarné par cet homme qui se battait contre ses instruments, à présent le combat se déroule aussi à l'intérieur, et le duo compense quelques faiblesses de songwriting par une plus grande richesse musicale. Faire un groupe à deux était une idée à double tranchant, et The Dodos décide de trancher avec les deux côtés. Certes, c'est beaucoup de mouvement pour peu de changement, mais on se doit de saluer l'énergie que mettent les deux hommes à ne pas se laisser étouffer par leur condition.
Edit: Je me trouve un peu trop en phase avec Pitchfork en ce moment...
moi je suis toujours aussi épaté leur science de la composition, leur facilité à nous surprendre encore, au bout de 4 albums, avec un projet aussi minimal à la base.
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