Tasca Potosina Awards 2013
Film de l'année :
Inside Llewyn
Davis de Joel et Ethan Coen
Le Loup de Wall Street de Martin Scorsese
Mud de Jeff Nichols
Chaque année j'attends le film des
frères Coen comme un bon moment de cinéma, mais après un juste
sympathique Burn After Reading, un trop long en bouche Serious Man ou
un décevant True Grit, j'ai accueilli l'arrivée d'Inside Llewyn
Davis après 3 ans d'attente avec tout le recul possible.
C'est-à-dire aucun. Imaginez un peu : un film des frères Coen,
dans le Village des années 50/60, avec pour sujet la scène folk de
cette période. Soit c'était pour moi, soit je n'avais plus qu'à
arrêter de croire en la vie. Et sans surprise, c'était pour moi. Ce
film si particulier, sans réel scénario, pas vraiment drôle ni
vraiment angoissant m'a touché comme aucun autre cette année. J'y
ai retrouvé tout ce que j'aime dans la filmographie des frères
Coen, à savoir un sens du détail, des dialogues mordants et une
esthétique soignée (bravo à Bruno Delbonnel d'avoir remplacé avec
brio l'excellent Roger Deakins). Mais aussi et surtout un supplément
d'âme, un petit quelque chose qui m'a immédiatement fait penser que
ce film tiendrait une place à part dans mon panthéon. De manière
plus objective, il m'apparait évident que, comme après Ladykillers,
il a fallu 3 ans aux Coen pour renouer avec leur meilleur cinéma.
Espérons maintenant que la suite saura faire honneur à la
régularité incroyable de leur travail.
Meilleur réalisateur :
Martin
Scorsese
Réalisateur prolifique, Scorsese a
pris l'habitude de ne pas décevoir. A tel point que chacun de ses
films est accueilli avec la satisfaction blasée qui s'impose face à
l'énième œuvre d'un réalisateur vieillissant. Sa collaboration
avec DiCaprio, bien que fructueuse (à un Oscar près) pour l'acteur,
n'a probablement pas été sa période la plus passionnante même si
on y a vu des films parfois très bons. Il manquait cette verve, ce
style et ce dynamisme qu'on n'attendait plus de la part d'un cinéaste
qui venait de fêter ses 70 ans. Pourtant, dès les premières images
du Loup de Wall Street, il est évident que Scorsese a puisé dans
les racines de son cinéma pour produire un de ses films les plus
dingues. Voix-off, montage frénétique et caméra fluide, on croit
voir le film d'un jeunot mais c'est bien la maîtrise d'un vieux
briscard qui transparait derrière ces trois heures de mégalomanie
orgiaques. Le projet semblait fait pour lui, et Scorsese a dépassé
les attentes en sachant renouveler son traitement des personnages,
allant jusqu'à laisser quelques observateurs sur le carreau.
Finalement, les réactions outrées lui vont bien mieux que
l'admiration polie, et même si l'on n'attend pas de lui qu'il nous
refasse le coup prochainement, il est bon de savoir qu'il en est
toujours capable.
Meilleur acteur dans un premier et
second rôle :
Leonardo DiCaprio / Matthew McConaughey
Depuis quelques années il y a peu
d'acteurs qui peuvent rivaliser avec l'envergure qu'a pris DiCaprio.
Choisissant soigneusement ses rôles au point de passer pour un
chasseur de statuettes, il est clairement à l'apogée de sa
carrière, et ce ne sont pas ses trois apparitions à l'écran de
cette année qui viendront démentir cette affirmation. Perturbant
dans Django, il habite avec excès mais justesse un personnage
atypique dans l'univers de Tarantino. Il porte sur ses épaules le
médiocre Gatsby de Baz Luhrmann et c'est probablement dans Le Loup
de Wall Street que l'on assiste à l'une des meilleures prestations
de sa carrière. A chaque fois, son visage désespérément juvénile
vient donner une profondeur souvent très juste à des personnages
puissants, qu'il se charge d'incarner avec l'ampleur dont il est
capable. Son jeu d'acteur est d'une telle régularité malgré des
personnages différents que l'on se prend à croire, comme certains,
qu'il dessine une véritable œuvre d'auteur en filigrane derrière
chacun de ses rôles.
A côté de lui, un autre acteur a
crevé l'écran lors de chacune de ses apparitions. Matthew
McConaughey n'a longtemps été qu'un acteur secondaire avec une
filmographie sans éclat, mais il rayonne depuis quelques années. A
la fois touchant, charmant et terrifiant dans Mud, il incarne le film
entier avec toute la profondeur que ce mot peut avoir. Cette
prestation inattendue est confirmée chez Scorsese où sa présence
furtive est hallucinante de justesse dans le ton et la gestuelle, au
point que DiCaprio est réduit au rang de faire-valoir (ce que son
personnage est à ce moment). 2013 est clairement l'année de la
confirmation pour lui, et on peut désormais croire avec certitude
qu'il faudra guetter chacun de ses rôles comme on le fait pour
les plus grands.
Meilleur actrice :
Adele
Exarchopoulos pour Adele dans La vie d'Adele
Cate Blanchett pour Jasmine dans Blue Jasmine
Veerle Baetens pour Elise dans Alabama Monroe
On a tout entendu sur Adele. Vivante,
gourmande, adorable, sensuelle, rayonnante... Son personnage a à ce
point imprimé la pellicule qu'il semblerait, enfin, qu'il n'y ait
pas de mots pour qualifier sa prestation. Evidemment soutenue par la
camera intime d'Abdellatif Kechiche, il est tout même remarquable
qu'une si jeune actrice puisse à ce point dévorer l'écran en y
étant continuellement présente. La vie d'Adele, sur lequel j'ai eu
un sentiment mitigé, ne peut cependant être qu'une réussite tant
le personnage éponyme y est incarné avec force, et Adele
Exarchopoulos est probablement la meilleure chose que l'on ait vu
dans le cinéma français cette année.
Meilleur scénario original :
The
Master
Beaucoup n'ont pas compris grand chose
à The Master. Moi-même, j'avoue être sorti de la salle un peu
perplexe. Pourtant le chemin que prend son histoire m'a tenu impliqué
du début à la fin, qu'importe l'éventuelle morale que l'on peut en
ressortir. Paul Thomas Anderson sait raconter les tours et détours
que prennent la vie d'un homme, et ici ce sont les moindres recoins
de l'étrange univers dépeint qu'il semble avoir pensé, comme si
l'on pouvait voir à l'écran les indications qu'il a donné sur le
tournage.
Meilleure photo :
The Master
Les premières images de The Master
frappent d'emblée par leur beauté, et donne le sentiment étrange
d'être « différentes ». Le total néophyte que je suis
y voit l'explication la plus plausible dans l'utilisation du format
70mm pour la grande majorité du film, qui donne à plusieurs
séquences du film un côté Hollywood déchu que le style d'Anderson
possède déjà. Parmi les nombreuses très bonnes photographies que
j'ai pu admirer cette année (entres autres Mud, Inside Llewyn Davis
ou Gravity) aucune ne m'a laissé une telle impression, au point que
c'est aujourd'hui la principale chose que je retiens du film.
Meilleur montage :
Le loup de Wall
Street
Comme évoqué précédemment, Scorsese
fait honneur à sa réputation en montant son film de telle manière
que l'on ait réellement l'impression d'être un trader cocaïné
pendant trois heures. A cela s'ajoute l'excellent timing avec la voix
off et les sursauts de plaisirs qui adviennent dans ce chaos d'images
et de musiques.
Meilleurs effets visuels :
Gravity
Dois-je vraiment m'expliquer là
dessus ? Tout le monde a dit que Gravity était une expérience
inoubliable au cinéma et un des meilleurs films jamais tournés en
3D, et tout le monde a raison. Les effets visuels ne sont sans doute
pas les seuls responsables de cela, mais disons que c'est plus
pratique de faire comme si.
Meilleure musique :
Inside Llewyn
Davis
Django de Quentin Tarantino/ Alabama Monroe de Felix van Groeningen
Du folk, du Tarantino, et du country. A
chaque fois, une justesse dans les utilisations et un talent pour
dénicher les bonnes chansons. Le premier a néanmoins ma préférence
car il ne souffre d'aucune réserve, à la différence du second
parfois trop attendu (« Freedom » de Richie Havens) et du
troisième pour de simples questions de goût.
Meilleur film « étranger » :
Blancanieves de Pablo Berger
Pouvait aussi concourir dans la
catégorie « meilleur film muet », mais il eût été
trop évident que je l'aurais créée spécialement pour lui. Par
étranger j'entends évidemment ni américain ni français, ce qui me
permet de parler du cinéma hispanophone pour lequel j'ai une
certaine affection. Blancanieves c'est à la fois le pari du muet et
le pari d'adapter un conte que tout le monde connaît. Ces deux
partis pris se complètent finalement très bien pour donner un film
certes très classique, mais du genre de ceux qui ne laissent pas
indifférent. Il n'y avait qu'un espagnol pour proposer quelque chose
de si atypique.
Meilleur film comique :
This is
the end de Seth Rogen et Evan Goldberg / The World's End d'Edgar Wright
A ma droite le premier film de la
clique Apatow sans leur mentor, et à ma gauche la très attendue
conclusion de la trilogie Blood & Ice Cream. Dans les deux cas on
aime déjà les personnages avant de voir le film, et dans les deux
cas il va s'agir de mêler amitié et catastrophe. Deux films sans
surprises, creusant leur humour caractéristique avec vigueur, mais
le fan acquis à leurs causes respectives s'est tout de même bien
marré.
Meilleur cameo :
Michael Cera
Michael Cera c'est le type qu'on
connait finalement assez peu même si tout le monde sait qu'il joue
toujours les mêmes rôles dans le même genre de films. Pour couper
court à cela, le jeune canadien a commencé par apprendre l'espagnol
pour se mettre au service du réalisateur chilien Sebastian Silva.
Mais il a surtout demandé à Seth Rogen et Evan Goldberg de casser
son image de petit garçon. Pari réussi, Cera se ruine complètement
en jouant une version génialement trash de lui-même dans This is
the end.
Actrice la plus fuckable :
Margot
Robbie
J'emprunte cette catégorie aux Drawas du Golb, parce qu'il faut bien s'avouer que c'est parfois une bonne
raison de regarder un film. Ici le verdict est sans appel, Margot
Robbie remporte l'award haut la main. On aimerait penser qu'elle est
plus que cela, mais quelque chose au fond de nous pense que c'est bel
et bien le personnage de Jonah Hill qui a la réaction la plus sensée
lorsqu'il la découvre pour la première fois dans Le Loup de Wall
Street.
Pire film :
Spring Breakers d'Harmony Korine
Ai-je vraiment envie de passer du temps
là-dessus ? Plus qu'un mauvais film, Spring Breakers est un
film surestimé à un point que je trouve incompréhensible.
Affreusement vide et banal – et pourtant je n'ai habituellement
rien contre le vide – j'ai le sentiment de voir une simple
enveloppe sans chair dans laquelle beaucoup ont voulu voir un chef
d'oeuvre. Je n'y ai vu que beaucoup d'ennui, et aussi un peu de haine
pour cette galerie de personnages insupportables.
Pire acteur :
Tobey Maguire pour Nick Carraway dans Gatsby le Magnifique / Sean
Penn pour Mickey Cohen dans Gangster Squad
J'hésite... Le premier traîne son
éternelle gueule de benet sans saveur, l'autre s'est lancé dans une
imitation d'Al Pacino dans Scarface digne d'un mauvais comique. Allez
hop, le coin pour les deux.
Pire actrice :
Lea Seydoux pour Emma dans La vie d'Adele
Ici j'ai du mal à savoir si c'est le
personnage ou bien l'actrice que je déteste, toujours est-il que je
la deteste bel et bien. Quelque soit l'émotion qu'elle joue, je
trouve qu'elle en fait trop, sans doute parce que son visage sans vie
ne peut être mu qu'avec excès.
Pire scénario :
Spring Breakers
Digne des pires skyblog.
Toujours content de lire tes articles (fallait que je le dise et que je sorte de ma pénombre).
RépondreSupprimerHâte maintenant de découvrir ton "top" musical de cette année (je dois avouer que tu m'as fait découvrir un paquet de trucs... vu que j'ai plus le même temps qu'avant pour fouiner -ah les enfants...- je suis bien content de sous-traiter héhé).
Merci ! Heureusement que je ne gagne pas ma vie à assurer de la sous-traitance musicale parce que j'aurais perdu ma clientèle depuis longtemps ^^
SupprimerJ'ai effectivement un top musical dans les tuyaux, mais comme je n'ai pas été très assidu cette année j'attends un peu avant de le lancer. Je vais tenter quelque chose de moins conventionnel qu'un top, je ne sais pas si ça plaira à tout le monde mais le contenu y sera en tout cas !
Abandon du blog ? :(
RépondreSupprimerR.I.P. :)
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