Holiday Blues pt. I: Woke up this morning...

Commençons par le commencement, le blues acoustique traditionnel. On pourrait considérer que je vous fait une histoire du blues, mais disons plutôt que je fais une des histoires du blues, la mienne. Et je commence par Blind Willie Johnson, qui n'est pourtant pas du Delta du Mississippi comme on pourrait le supposer, mais du Texas. J'ai choisi de m'attarder sur « Nobody's Fault but Mine », que je trouve particulièrement intéressante pour plusieurs aspects. Déjà il y a ce jeu au slide reposant sur quelques gimmicks comme le veut la tradition du jeu de guitare blues, mais tout en étant relativement original. Et puis cette voix qui sait ce faire aussi douce que terrifiante, celle d'un prêcheur, vous marque pour un bon moment. Un prêcheur un peu fataliste, comme le montrent ces vers « I have a Bible in my home / If I don't read my soul will be lost / It's nobody's fault but mine »



Ce n'est pas toujours facile d'écouter du Delta Blues, et à ce sujet il y a un passage des Chroniques de Bob Dylan que j'ai beaucoup aimé. Il revient sur ses débuts en sudio, et raconte que John Hammond lui avait confié un acétate de Robert Johnson, que l'on redécouvrait tout juste à l'époque. Il décrit donc le moment où il a entendu pour la première fois Robert Johnson avec son ami Dave Van Ronk (à l'origine de l'arrangement dylanien de "House of the Rising Sun" voué à un certain succès pour la petite histoire.) Ce dernier est sceptique, mais Dylan est subjugué: « Ces chansons-là n'étaient pas du blues ordinaire. Elles étaient très élaborées. […] J'étais hébété, comme si on m'avait injecté des tranquilisants avec un fusil à seringues. » En grand connaisseur de la musique traditionnelle américaine, Dylan commente: « Johnson avait de ces mots qui transformaient mes nerfs en cordes de piano. Le sens et les sentiments sont élémentaires, et pourtant il y a un état d'esprit précis. » Et il conclut par « Johnson avait la dureté de la terre brûlée. Je voulais être comme ça moi aussi. »

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