Toi petite, c'est sûr tu es un hit

 Cet article a été rédigé en août 2010.

Aujourd'hui, je voudrais vous parler d'un morceau qui m'a hanté et qui va encore me hanter longtemps je pense. Ce fut un peu mon tube de 2009. Et pourtant, j'aime autant vous prévenir, il n'a rien d'un tube. Ce sont 10 minutes de longues expérimentations sonores dont je vais vous parler. "Surf Solar" est néanmoins imparable. Mais il faut savoir le prendre. Je ne l'écoute pour ma part que dans les transports en commun, là où on n'a rien d'autre à faire que d'écouter de la musique et de regarder le paysage.


Il est issu de l'album des Fuck Buttons de 2009 qui mérite d'ailleurs d'y jeter une oreille. Mais "Surf Solar" en fait déjà une parfaite introduction. L'intro, faite de bruits stridents qui s'ajoutent les uns aux autres et se remplacent, est absolument impossible à cerner. On distingue les différentes nappes, mais rien qui ne semble s'éclaircir comme dans un morceau d'Animal Collective. L'élément qui va faire démarrer le morceau n'a rien de progressif, de subtil ou d'original. Il est brutal, il est si facile qu'on ne s'y attend pas. Car c'est juste une violente pulsation de basse qui vient se poser sur cette amas sonore indescriptible. Comme s'il avait fallu supporter la première minute pour avoir le droit d'accéder au reste du morceau.

Et à partir de là, ça devient magique. L'enchevêtrement sonore devient secondaire, et on se concentre sur le tempo comme une valeur sûre, et les Fuck Buttons se permettent d'en rajouter avec un petit clic syncopé qui nous fait carrément saliver d'entendre la suite. Et Dieu sait que la suite vaut la peine d'être écoutée. Ce n'est ni plus ni moins pour moi que le meilleur beat electro que j'ai jamais entendu. Le genre de truc qui te choque au début, par un son totalement inimaginable, mais qui révèle rapidement son potentiel dansant. Ce que l'on entend à 1min50, ce n'est rien d'autre que du bruit. Du bruit à l'état pur. Mais du bruit si finement découpé et orchestré qu'il en ressort un rythme extraordinaire. Au fur et à mesure on croit percevoir des cris qui se collent juste sur les temps forts du beat. C'est du très grand art que de pouvoir construire un truc comme ça, aussi simple et aussi incroyablement original. 


Et maintenant, nous voilà embarqués. Ce beat se suffit à lui même, comme les premières notes de la 5e symphonie de Beethoven, et tout le reste c'est du remplissage... Je plaisante un peu, mais il y a de ça. Car après cela, qui me fait l'effet d'un kidnapping, comme si on se faisait brusquement enlever alors qu'on avançait à tâtons dans le noir, tout décolle. De grandes nappes de saturation surviennent et on nous a déjà emmené très très loin. Et rendu ici, quand on a sauté du haut de la pente et que l'on plane, ça peut durer aussi longtemps que possible, tout est magnifique. Et toutes les subtiles modifications apportées à la trame sonore, à peine perceptible, nous donne l'impression d'un paysage qui évoluerait lentement sous nos yeux.

Histoire d'en remettre une couche, les Fuck Buttons nous introduisent une turbulence jouissive avec des percussion tribales vers la seconde moitié du morceau. Là on se dit que c'est à peine possible d'aller encore plus loin, de voler plus haut ou de plonger plus profond, et pourtant dans la minute suivante, le surplus d'énergie et de violence sonore vient nous frapper une fois de plus là où on ne s'y attendait pas. A ce niveau là, on ne contrôle plus rien, on est complètement baladé, c'est l'apocalypse totale. Puis tout se calme, et il ne reste plus que des lointaines résonances de notre expérience, qui nous paraitraient totalement insoutenables si on écoutait la chanson à l'envers. Et pourtant elles nous laissent sur le bord du rivage, un peu mélancolique.

"Surf Solar" c'est un peu la chanson du kairos, du bon moment. La chanson qu'il faut savoir écouter quand il faut pour l'auditeur, et la chanson qui sait tout placer en temps voulu, pour le musicien. Peu facile à apprivoiser, sa puissance émotionnelle peut vous surprendre si vous n'y faites pas attention...

Commentaires

  1. Ça doit être comme tu dis la chanson du kairos, c'est exactement ce que je recherchais en ce lundi matin. Et le titre de ton post est aussi coolos.

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